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"Ni autochtone, ni contemporain: Beyond the Occident"


Merci beaucoup à ceux qui se sont déplacés à La Colonie, Paris, France

;-)

Merci à Françoise Vincent et Elohim Feria pour leur invitation.

Merci à Kader Attia et la Colonie !

Merci à Valerie Roger pour cette photo !

Pour ceux qui n'ont pu y assister, voilà le texte de mon intervention :

"Beyond The Occident"

Pour cette intervention, j'ai choisi de ré-activer les écrits de l'époque du projet "The shiwiars project" en 2005 réalisé pour le Palais de Tokyo à Paris.

Le concept en était simple, établir un lien entre une tribu de Jivaros au plus profond de l'Amazonie et le Palais de Tokyo.

En 2007 dans le cadre des résidences Arts aux Pôles organisées par Françoise Vincent et Elohim Feria et l'Institut Polaire Paul Emile Victor IPEV, je partais un mois entier au Spitzberg dans une base polaire arctique à la limite du Pôle Nord qui donnera naissance à une deuxième projet nommé "Ny Alesünd POle 0".

Pour ces projets, des travaux de recherches avaient été fait de ma part, qu'ainsi qu'une réflexion écrite à l'origine de deux blogs dédiés à ces deux projets.

Pour cette raison, j'ai choisi de faire cette présentation sur le mode épiphanique, en vous présentant plusieurs de ces pensées écrites.

1- Amazonie:

The Shiwiars project:

L'origine de ce projet repose sur deux faits:

- La globalisation entraînant une déforestation, une détérioration climatique et la disparition des communautés premières.

- Les émotions acquises aux cours de lectures que je recommande le plus vivement avant la consultation de ce projet.

En effet de nos jours, l'amazonie véhicule toutes sortes de fantasmes exotiques, d'aventures, et à la fois une image de virginité à préserver à tout prix. Mais de quelle virginité parle t'on ? que cache ce besoin de sauvegarde basée sur le dessin de frontières infranchissables et sur la sédentarisation des tribus dans des soi-disant 'parcs naturels' ?

Et que dire des disparitions et déportations en nombre de petites tribus lors de prospection minières ?

De nos jours, on s'émeut fortement sur la disparition des territoires des ours blancs en arctique due à la fonte de la banquise provoquée par le réchauffement de la planète provoqué par notre consumérisme hystérique; mais on ne parle guère de la disparition d'hommes dans les forêts vierges déforestées et sur-exploitées; la disparition des oiseaux est beaucoup plus sensationnelle pour les médias et plus émouvantes que celle des hommes qui nous renvoient l'image de notre barbarie:

Les hommes nous jugent, pas les animaux, ces victimes humaines à nos yeux ne peuvent être tout à fait innocentes...

Les Jivaros d'Equateur ne sont ils pas d'affreux barbares réducteurs de têtes ?

C'est bien pour cette raison, que pour ce projet mon intérêt s'est porté sur cette communauté qui a su très tôt (dès les années 60) instaurer un dialogue politique et économique avec notre monde. Ces derniers sont tout aussi victimes des mêmes fléaux et maux qui touchent ce vaste territoire forestier et représente par excellence le faux cliché 'barbare primitif' accolé aux peuples premiers.

Ainsi ce blog narrera mon bref voyage et immersion dans une communauté shiwiars de 18 âmes à la frontière du Pérou et de l'Equateur en Haute Amazonie dans une région nommée 'Pastaza'. Il s'agit du petit village nommé 'Tanguntsa' à une heure de vol en avionnette de Puyo ville pétrolière extrême limite de notre monde civilisé à la porte de ces territoires.

Il s'agit de shiwiars, ce sont à priori des achuars ayant fondé leur propre communauté il y a peu (ethnogénèse). Ils se sont lancé dans un projet eco-touristique afin d'acquérir leurs terres ancestrales. il s'agit du projet Ikiam

5 Septembre 2005: Tropiques et Tropismes

Les tropiques ont des noms symboliques et évocateur: "Capricorne", "Cancer"... et n'ont cessé de nourrir la littérature de Levi-Strauss à Miller. Souvent quand on en parle, toutes personnes les évoquant provoquent un tropisme chez son interlocuteur, un trouble de la perception mélangeant exotisme, rêves et fantasmes...

En planifiant cette petite expédition, je ne peux m'empêcher de penser à mes voyages précédents, de kalimantan à Bornéo au Delta du Waouri au Cameroun. Toutes les tropiques se ressemblent et se dissemblent, toujours la même sensation de régression foetale quand on pénètre dans une jungle:

A la frontière de la Birmanie en Thaïlande dans les environs de Chiang Maï, en plein coeur de Kalimantan à Bornéo, à la Monkey forest de Bali, dans les mangroves du Delta du Waouri au Cameroun, aux confins de la Guyanne, ou encore dans ces petites jungles des îles caraïbes. Une température équivalente à celle de notre corps, une humidité opressante et réconfortante apportant une plénitude à nos poumons. L'obscurité et le silence de nos forêts continentales nous effrayent, les cris, les chants, croissements et bruits divers tous assourdissant dans la jungle nous rassurent. On se sent enveloppé, en communion, on baisse la garde et l'on devient imprudent en ces milieux hostiles. Ne parlons pas des maladies que l'on ramène de ces voyages, la malaria, la dengue et toutes les parasitoses qui vous clouent au lit des semaines et vous gratifient d'un catalogue d'anticorps qui fascine tout immunologue. Et si on se laisse glisser sur les pentes de ces souvenirs, les clichés pleuvent en cascade ...

Si tous ces faits ont leur part de vérité, il ne faut surtout pas qu'ils occultent l'essentiel, à savoir la rencontre avec l'autre à la limite de notre monde, parfois maladroitement et inconsciemment perçu de notre part comme en dehors de notre monde. Sans parler qu'avant même de les rencontrer, chez nous ces communautés sont auréolées et drappées de leur statut de victime avec tous les effets pervers que cela apporte: "On veut le bien pour les indigènes", "On décide ce qui est bien pour eux" et comme tout enfer pavé de bonnes intentions, ainsi sont reproduites d'années en années et de siècles en siècles les mêmes erreurs:

Il y a cinq cents ans, on voulait leur bien au nom du Christ, de nos jours on leur veut du bien en leur nom en les figeant dans un floklore éxotique:

Ainsi les dogons ne devraient pas utiliser de couleurs acryliques sur leurs masques kanaga, ainsi les jivaros ne devraient pas utiliser des bassines en plastiques, gare! ils s'acculturent, et bien sur quel est le meilleur juge pour cette acculturation? nous les blancs mieux habilités pour juger de ce qui est bon pour eux, en les figeant dans leur tradition et en les parquant dans des réserves qui divertiront les riches touristes en mal de virginité et d'exotisme:

Un indigène est tellement plus divertissant quand il est emplumé et surtout qu'il reste emplumé !

Face à cela on ne peut s'empêcher de penser à la parfaite symétrie inversée de ce que faisaient et font toujours les évangélistes intégristes...

Ce même fascisme nourris de bonne conscience:

- Avant on les emprisonnait dans notre fantasme de rédemption au nom du Christ

- De nos jours on les emplume pour leur bien et on les parque dans leur mémoire qu'on sévertue à fossiliser !

Et si l'acculturation était le propre de la culture ?

Car la vraie question est de ne pas de se demander ce qui est bon pour eux, car ils sont tout à fait capables de décider pour eux mêmes ce qui est bon pour eux, la vraie question est:

Est ce qu'on leur fait confiance ? Car d'un côté en voulant formater cet 'autre' dans notre fatras cruciforme et de l'autre la volonté de le figer dans nos clichés de ce qui est censé "être primitif", il s'agit sur le fond du même fascisme puritain !

Dans les deux cas, le dialogue avec l'autre est rejeté, car ce dialogue fait peur !

En effet que doivent penser ces chers dirigeants WASP des groupes pétroliers quand des communautés indiennes virent le président à leur solde en Equateur?

Car en vérité, il n'y a aucune opportunité que leurs intérêts convergent avec ceux de notre société, et le salut viendra le jour où notre chère société acceptera cette différence et cette divergence en la vivant avec pleine conscience, tolérance et respect !

Car en bon hypocrite, il est plus aisé de se donner bonne conscience en achetant des sels de réhydratation pour l'UNICEF, en se confortant sur leur statut de victimes que de leur donner une vraie opportunité de choix de ce que devrait être leur destin, en étant chaque jour en état de vigilance sur la conséquence de nos actes dans notre quotidien en terme de biodiversité, de climatologie et surtout en terme d'écologie humaine tout simplement !

La solution est tout simplement d'accepter l'autre pour ce qu'il est, en est t'on vraiment capable ?

29 Septembre 2005: "Le regard"

Je ne suis pas ethnologue, je ne suis pas anthropologe, je ne suis pas philosophe, je ne suis pas encore un auteur littéraire mais juste un artiste plasticien. Je n'ai aucune réponse, que des questions, des questions qui éloignent mon horizon et apportent de nouvelles questions qui en apporte encore et encore de nouvelles... A chaque question, une porte, un passage et l'horizon recule. Je ne cherche pas mais je trouve, des évidences poétiques, plastiques qui n'ont besoin d'aucun discour et encore moins de certitudes. Chacune de ces évidences apporte un goût de finitude, la vision de sa propre fin, et cette vision là aiguise le regard chaque jour.

Ce regard questionne le monde autour de moi, ces questions représentent "une distance", "une césure" entre le monde et moi, qu'irrésistiblement je comble par des trouvailles, ces évidences plastiques...

La modernité, la post modernité, et la globalisation tend à abolir cette distance, alors je comprends mes choix pour ce projet:

Je ne fais pas exposition à New York, je ne parle pas de Tokyo encore moins de Mongkok à Hong Kong comme je peux le faire à la Triennale d'Hasselt en Belgique:

Que je sois à New York, Tokyo ou Hong Kong je reste artiste, je suis derrière mon masque social, et, je l'avoue, parfois, j'adopte une posture (celle que l'on attend de moi). On échappe pas à son image qui nous identifie, on est cette image au même titre que l'on vit son identité.

Mais que serais je à Tanguntsa ? je ne serais certainement pas perçu comme artiste et je n'aurai aucun masque social et aucune posture ne sera possible...

Je serai un homme face à d'autres hommes, et je ne cesserai d'être fasciné par l'universalité de l'humain au délà des croyances et des certitudes...

J'évoquais un souvenir d'Afrique, il y a quelques semaines: "la régression feotale que l'on ressent au coeur d'une jungle", et ce que je décrivais comme une "régression" n'en est pas une, je me dis que quand je serai entre deux lieux, entre deux rives sur une pirogue, je ne pourrai m'empêcher de regarder cet écran bleu au dessus de ma tête, et sur les deux rives cet écran vert hébergeant une multitude d'êtres fantastiques, de non humain, mais là dans cette nature pleine, je ne serais guère différent de ces autres, pas moins animal qu'humain, juste un être conscient de sa précarité...

Et là aucune transcendance, aucun mysticisme, juste la synchronisation de l'esprit, du corps, au sens physique, pleinement physique...

28 Octobre 2005: Jungle

Le soir, les images, les sons et les effluves de la jungle ne cessent de me hanter lors de mon coucher. Car c'est le seul endroit que je connaisse où vous pouvez aisément trouver une vue, un panorama où rien ne laisse paraître une intervention humaine, pas même les lignes blanches et scintillantes dessinées par nos jets dans les cieux.

Juste soi, face à un désordre organique qui vous caresse dont même l'air se fait matière : son humidité, sa densité, sa richesse oxygénée vous caresse le corps et vos poumons d'une façon si sensuelle.

Je ne peux décrire la sensation que l'on ressent lorsque lors de la tombée de la nuit, on prend son bain dans la rivière en faisant face à son cours et ses berges devenant hautes et sombres et disparaissant dans la lumière crépusculaire et les limbes brumeuses s'échappant des cimes.

Pas de noir, mais de la couleur cacao de l'eau, au ceruléum virant à l'outremer du ciel ruisselant sur les veines jades, porphyres, émeraude et saphire de la forêt, vous ressentez la communion et la plénitude : aucun tourment mental, aucune angoisse, juste vous, un corps parmi d'autres, une petite vie perdue dans l'immense biodiversité, et une humilité souriante vous envahit.

De ma vie je n'aurais jamais senti un air si pur, pas une odeur nauséabonde, juste les parfums organiques des plantes, le musc des animaux, et l'humidité ambiante ayant sa propre saveur quand on daigne ouvrir la bouche et tirer la langue comme le font les petits enfants shiwiars.

Face à ces impressions, je ne cessais de me dire comment le douanier Rousseau avec "la charmeuse de serpents" avait si bien su retranscrire cela picturalement sans jamais s'être rendu dans de tels endroits ?

Le projet, la pièce, la réponse :

« Réponse »

par Marc Sanchez

10 novembre 2005

Plus de deux mois après le lancement de l’opération baptisée « The Shiwiars Project », nous voici à l’heure de la réflexion sur le chemin parcouru, sur les actes produits et sur les objectifs atteints ou non.

Le lien avec la communauté Shiwiars de Tanguntsa a été établi, l’artiste a séjourné sur leurs terres, partagé leur quotidien, chassé à la manière indienne, joué avec les enfants, goûté à la boisson préparée par les femmes. Le temps passé en leur compagnie a pourtant été bref, s’écoulant au rythme de journées dont la lumière du soleil, absente dès six heures le soir, obligeait à accompagner le cycle de la nature au plus près. Malgré la distance culturelle incommensurable, la conversation s’est engagée et le dialogue sans mots était parfois le plus intense lorsque tout devait se dire par la seule expression des regards.

La présence de l’artiste sur place ne fut donc pas anachronique, la rencontre des objets ne produisit aucun heurt et la caméra numérique sembla aussi naturelle à l’indien que la sarbacane à l’artiste. Des images furent saisies pour être transportées en d’autres lieux, confrontées à d’autres cultures, à d’autres pratiques de l’espace et du temps. Les présents utiles le furent réellement, les cahiers d’écolier et les stylos à bille trouvèrent usage dans la case réservée à l’école. Le papier y est rare, les instruments précieux, écrire en bleu et en rouge est un luxe qui éclaire le sourire d’un enfant. Pour eux, le Palais de Tokyo aura été celui qui apporta un peu de couleur dans cette écriture inventée par les Shiwiars il y a seulement quelques années et qui, déjà, leur semble si naturelle qu’il l’envisagent sur des supports multimédias pour transporter leur culture ancestrale vers d’autres continents.

Puis le voyage se fit en sens inverse. De la forêt amazonienne à la jungle parisienne, Pascual Kunchicuy franchit la distance sans états d’âmes et avec un naturel qui stupéfiât ceux qui l’on croisé dans les bureaux du Palais de Tokyo, dans les rues de Montmartre ou dans les tables rondes publiques pour débattre du bien fondé du « Shiwiars Project ». « Paris est faite d’arbres sans feuilles, de pierres et d’hommes », dira-t-il au terme d’une grande journée d’exploration de la capitale. Les pierres et les hommes sont rares dans sa forêt et les feuilles, lorsqu’elles tombent de l’arbre, en annoncent seulement la mort prochaine.

De cette aventure, reste un film de six heures. Un plan fixe du village qui rend compte du lent déroulement d’une journée comme les autres. Le vent dans les feuilles, un nuage qui change la lumière du ciel, un passant qui coupe le champ de la caméra, un poulet qui picore. Dans ce film il ne faut pas chercher l’anecdote, l’histoire exotique, le compte-rendu de l’événement. C’est d’un déplacement dont il s’agit, d’une brèche ouverte dans l’espace du Palais de Tokyo pour y insérer un peu du temps et de l’espace de Tanguntsa. Tel qu’il est. Sans artifice, brut.

Le décalage est aussi radical dans l’espace d’exposition qu’il le fut dans le village amazonien. Et si quelques clés sont livrées pour saisir l’ampleur de l’image, elles n’ont valeur que de commentaire, tel le blog de l’artiste sur Internet ou le film documentaire tourné pendant chacun des jours du voyage.

« The Shiwiars Project » aura donc été une véritable aventure humaine. Celle de la confrontation, de la prise de conscience respective des différences, mais, surtout, celle de l’activation des nombreux points de coïncidence révélés par le chemin parcouru ensemble. Le collage en une seule image de ces deux paysages dévoile la pertinence de la rencontre, la force plastique du rapprochement et, pour la première fois depuis le début de l’histoire, apporte les éléments d’une réponse aux nombreuses questions posées par l’expérience.

2- "Ny Alesünd Pole 0": Résidence Arts aux Pôles, IPEV, année internationale Polaire 2007.

3 Septembre 2007: "Les cercles du temps"

Point d'images figurant le temps, le temps est un cercle, le cercle est une ouverture, un cycle, un champ. Le pôle nord, est un cercle au 80 degré nord, zone de grand froid, de temps divers:

- Le temps géologique où dans les terres du Svalbard, tout rappelle des natures perdues, figées: Les forêts fossilisés, les cadavres gelés des baleiniers dans des cercueils ouvert à la blancheur mortelle. Les squelettes blanchis des bélougas, phoques, morses. Les vertèbres abandonnées et arrogantes. Les roches schisteuses plissées cisaillant les éléments, déchirant les nuages du haut de leurs éternités passées. Les glaces plissées et mordorées creusant les fjords. Les côtes gangrénées et érodées par les flots aciers...

- Le temps corporel, criant de douleur sous l'agression des rhumatismes, quand les températures montent au dessus de zéro. Cette humidité moisie et froide qui ronge toutes les chairs pour faire greloter, frissonner. Le froid négatif qui provoque des douleurs affreuses à l'extrémité des doigts pour provoquer des frissons douloureux dans les membres. Ce froid coupant, cisaillant par traitrise la peau à la commissure des yeux, et dans les divers plis de notre corps...

- Le temps solaire qui étire les nuits et les jours pour les rendre interminables et insupportables. Ce jour sans fin qui interdit le sommeil et les rêves. Cette lumière blafarde qui aveugle et rappelle la course de notre planète autour du soleil...

- Le temps de la terre, qui vous expose une terre dénuée d'humanité où les hommes sont des intrus. Ce temps qui vous pousse au mystique par le silence écrasant et la contemplation des lieux qui vous condamnent.

- Le temps animal quand par la majesté d'un ours polaire dressé vous fixe dans les yeux avec une expression si humaine, vous invitant presque à vous cajoler dans son pelage quand d'un coup de patte il peut vous arracher la tête. La virtualité de sa présence entaillant votre dos du poids d'une carabine de calibre 308 vous torturant pendant vos déplacements . Le temps d'un souffle entendu, celui de la respiration d'une baleine dans cette immensité silencieuse. ce souffle qui suspend le temps sous un ciel acier en déformant une surface miroir.

Tous ces temps inhumains qui vous rappellent l'incongruité de votre présence et la stupidité des explorateurs nantis puant le fauve que vous croisez en ces lieux. Ces gens qui portent leurs souffrances, et puanteurs comme des trophées de leur masochisme transformé en exploits. Ces pseudo explorateurs marchant sans but si ce n'est celui d'emprunter les pas des récits héroïques des temps des origines de notre modernité !

C'est de tous ces temps que mon installation vidéo essaye de rendre compte, par une image semblant fixe, dont la lumière ne change pas, mais fait un tour d'horizons en 24 malheureuses heures...

4 Juin 2007 : Déambulations

Dans les villes, les déambulations sans destination débouchent sur des épiphanies très joyciennes non dénuées d'esthétique, de poésie. Mais qu'en est-il d'une déambulation polaire ?

Cela devient totalement surréaliste, car déambuler nécessite un laisser-aller, et un calme intérieur. Mais est-ce possible avec un fusil en écharpe, et des balles de 306 dans sa poche ?

Cette croix de l'enfer finit par se faire oublier... Mais tout commence, quand, après des heures de marche sur les rives fjord, on s'assoit sur un bois flottant échoué en laissant l'eau laisser lécher le bout de vos chaussures. C'était à Bandalpyten. Le fusil posé sur le côté, l'horizon mène le ballet:

Des rideaux de plomb s'affrontent sous des nuages très bas avec des rideaux de lumières très blanches déclinant des nuances de pourpre et d'azur. L'eau est lisse comme une feuille d'acier, pas un flot. Des scarifications noires des îles alentours apparaissent sur des nappes blanches (les rives opposées) et s'évanouissent dans le blanc du ciel.

Puis une virgule noire caresse la surface de l'eau, un souffle profond fend le silence, puis cette chose s'approche de la rive et mène un ballet circulaire à dix mètres de vous. Des eiders volent au raz de l'eau, font des cercles au dessus de ce petit Orquale et le temps s'étire... sur 20 bonnes minutes qui en paraissent dix...

On rêve, puis en se levant, on réalise que si l'on verbalise cette expérience, cela devient un cliché digne du 'lonely planet'....

Tout a déjà été vu et vécu, et cette contemplation unique ne peut plus être partagée, mais vécue égoïstement avec un sourire désabusé...

Les deux oeuvres produites sont désormais dans les collections permanentes du Centre National d'Arts Plastiques et du Fonds National d'Art Contemporain.

Valéry Grancher 2005 - 2017

Photo: Valerie Roger


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